«Les Italiens» est un spectacle conviant au plateau des immigrés ainsi que fils d’immigrés et un duo de danseuse en Suisse. Un théâtre des identités entre être et paraître, aspirations et réalités.
Conçu par le tandem Massimo Furlan (mise en scène) et Claire de Ribaupierre (dramaturgie), Les Italiens s’inspire de la forme de l’opéra tient de l’atelier de création radiophonique. A partir de son pays d'origine, du foot et de son vécu, Furlan qui bambin se rêvait aussi Superman - aime ainsi à créer des icônes et des mythes artistiques.
En voiture
Prenez ce trio de retraités immigrés maintenant en super-héros. Voyez les soulever notre Helvetia assise dans une Fiat 500. Avec d’autres ensuite, les Italiens ont fait et construit ce pays. Exploités comme le montre le statut inique de saisonnier peu évoquées dans le spectacle. Mais rayonnants de reconnaissance et d’accomplissement envers leur pays d’élection et d’accueil. Se réalisant dans les domaines hôteliers, de la vente et de la chanson notamment.
Nous voici projetés au théâtre qui doit sortir des théâtres conventionnels et autres boîtes noires, allant à la rencontre de non-professionnels, tout en captant ses moyens de production. Et retrouver le vrai sens de vécus par ceux qui l’ont vécu.
Mosaïque de récits
On songe ainsi aux narrations éprouvées d’émissions telles que Les Pieds dans le plat sur France Culture. Voire Strip-Tease au petit écran, l’émission de la RTBF créée en 1985 et disparue en 2012. A l'origine, elle visait à plonger dans le quotidien de personnes aux parcours atypiques. Absence de voix off ou de musique et montage minimaliste, Strip-Tease s'approche davantage du documentaire que de l'émission télévisée. Ici, les caméras s'effacent et laissent place aux témoignages. Au final, des moments de vie forts et touchants, loufoques et déroutants.
La pièce parle aux spectateurs comme un ami intime. Ce n’est plus un traité de sociologie voire d’anthropologie sociale. Mais plutôt un petit livre composé de vies réelles, d'une série de moments vécus - comme on en trouve dans un album de photos de famille. Ne reniant ni les émotions et sentiments à plies bouillons, ou le lyrisme populaire (La Traviata de Verdi). L’opus privilégie l’effet de reconnaissance au miroir de de son propre biopic familial.
Incompris
La chanson d’amour à une Helvetia inquisitrice, Mi sono innamorato di te, son auteur, Luigi Tenco, reste un incompris. Il s’est suicidé à 29 ans et dans des circonstances mystérieuses au festival de San Remo en 1967. On y trouve l’ambivalence du sentiment amoureux, parade à la plus haute des solitudes. Je suis tombé amoureux de toi/Parce que je n'avais rien à faire. Le jour je voulais quelqu'un à rencontrer/La nuit je voulais quelque chose à rêver.»
Luigi Tenco reste incompris. Pareillement à Alexia Casciaro, qui le chante maintenant en clone de Dalida, affichant perruque rousse et robe fourreau lamée de paillettes. Ce qui ne doit rien au hasard. Tant le destin tragique du jeune artiste est intimement associé à celui de Dalida, sa maîtresse. Le travail de diplôme à La Manufacture - Haute Ecole de Théâtre romande de la jeune danseuse pratiquant les arts martiaux a pour titre dérivé de Brecht, «Qui ne lutte jamais aura tout perdu». Ainsi subsumée l’histoire d’Italiens arrivés et établis en Helvétie retrouve son sens premier.
Bertrand Tappolet
Site de l’artiste: www.massimofurlan.com/
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