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  • Photo du rédacteurbtappolet

Eau et plastique

Le spectacle guinéen «Yé ! (L'eau)» réuni acrobaties ciselées et engagement social.


"La Nuit tombe", photo de la série "L'Oeil cacophonique" inspirée de l'univers dada et de Facebook. Aurore Valade


A la source de Yé ! (L'eau), la Compagnie Baobab, un collectif de treize artistes guinéens ex-enfants de la rue, âgés de 18 à 32 ans, dont deux femmes.


Le spectacle offre bien plus qu'un simple divertissement à base de pyramides humaines continument reconfigurées: il invite à une réflexion profonde sur les enjeux environnementaux et sociaux, à travers le prisme de l'eau, ressource essentielle et terriblement menacée.


Communauté


Les acrobaties, inspirées de danses et rites africains, racontent des histoires de communauté, de résilience et d’harmonie avec la nature, témoignant de l’importance de la transmission culturelle. Le chant soussou accompagnant l’échauffement des artistes, par exemple, est un rappel poignant de leurs racines et de la richesse de leur patrimoine oral.


Effets de grappes et nuées, prises de gorge, envol, contorsions, iconicité de pietà, crucifixion ascensionnelle tournoyant au sein d’une pyramide humaine, combats aériens, violences des projections de corps, battle devant une audience en arc de cercle, bouteille d’eau plastique comme objet relais faisant circuler le liquide source de vie, fardeau et poison environnemental: le show circassien et chorégraphique ne recule devant aucun symbole universel ni tableau vivant marquant pour fouetter les consciences. Et ravir la mémoire rétinienne.


Confiance mutuelle


À travers des numéros somme toute formellement assez classiques qui allient la force physique à une grâce aérienne, les artistes révèlent une maîtrise technique impressionnante. Les pyramides humaines et les portés lancés ne sont pas de simples prouesses athlétiques.


Ils incarnent la solidarité et la confiance mutuelle, essentielles à la survie dans un environnement précaire. La chorégraphie, mêlant le cirque à des danses millimétrées, rend chaque mouvement significatif, chaque tableau une histoire en soi, reflétant la lutte quotidienne pour l'accès à l'eau.


Engagement social


A l’origine, grâce à des formateurs français, une cinquantaine de jeunes se sont initiés aux trampolines, trapèzes fixes et volants et mât chinois. Au-delà de l'aspect artistique, la compagnie s'engage depuis dans un cirque social, offrant à des jeunes défavorisés une voie vers l'expression artistique et la professionnalisation. Cette mission d'inclusion sociale et de formation des juvéniles talents est un aspect fondamental de leur démarche, soulignant l'importance du cirque comme outil de transformation.


Défiant les conventions, tuilant habilement acrobatie, danse, chant et thématique environnementale, ce spectacle est un rappel puissant que l'art peut être un vecteur de changement, un moyen d'éveiller les consciences sur les défis de notre temps.


Les treize acrobates invitent à un périple émotionnel et intellectuel, mettant en lumière la fragilité de notre rapport à l'environnement et la force de l'esprit humain face à l'adversité. « Yé ! » est, en ce sens, une célébration de la vie, un appel à l'action pour la préservation de notre bien le plus précieux et convoité: l'eau.


Photos: Cédric Metili


Bertrand Tappolet




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